Sans être un véritable élément de composition de l'image, la netteté constitue un paramètre important, contrôlable par le photographe, pour mettre en valeur la partie essentielle du sujet et guider ainsi le regard de l'observateur au milieu d'un environnement plus ou moins flou. S'il peut être agréable, en effet, de dégager un portrait en plein air sans pouvoir discerner le fond, la photo de paysage, en contrepartie, impose généralement une grande netteté sur l'ensemble de l'image.
Le photographe est donc amené, lors de la prise de vue, à maîtriser la zone de netteté souhaitée en fonction de l'effet recherché. Cette netteté est rendue par la Profondeur de Champ (PdC), qui représente l'étendue (en avant et en arrière de la mise au point) et qui dépend de 4 paramètres :
Plusieurs méthodes sont mises à la disposition du photographe pour vérifier la netteté de l'image au moment de la prise de vue.
La plupart des reflex sont dotés d'un bouton permettant de fermer le diaphragme à la valeur présélectionnée et de vérifier dans le viseur la netteté de l'image obtenue. Ce contrôle visuel peut conduire à modifier la distance de mise au point et/ou l'ouverture du diaphragme pour augmenter ou diminuer la PdC.
C'est une méthode sûre et très pratique qui ne peut être qu'à conseiller.
La plupart des objectifs sont équipés de repères permettant de lire, après avoir fait le réglage de mise au point, les limites avant et arrière de netteté pour chaque ouverture de diaphragme.
C'est l'échelle de profondeur de champ.
Bien que pratiquement inutile lorsque la PdC peut être appréciée visuellement sur l'image ou estimée à partir des repères d'objectifs, cette méthode est nécessaire avec les appareils non reflex à visée télémétrique, avec les reflex bi-objectifs, ... et lors de travaux "pointus" réalisés par les experts et les "pinailleurs" que nous sommes ! ...
Les tables de profondeur de champ sont généralement fournies par les fabricants, avec les objectifs (ou les appareils).
Nota : Ces tables sont élaborées focale par focale, en tenant compte des 4 paramètres déjà cités et intervenant dans le calcul de la PdC. Des différences peuvent apparaître entre les tables publiées par les constructeurs d'objectifs et celles calculées à partir de cet article, du simple fait de la valeur admise pour le cercle de confusion (qui est une information relativement subjective pouvant donner lieu à discussion !)
Lorsque la netteté est nécessaire "en profondeur", le réglage sur la distance optimale permet une PdC idéalement répartie et s'obtient en se calant sur la distance hyperfocale (Hy) : la zone de netteté s'étend alors de Hy/2 à l'infini.
L'hyperfocale dépend de 3 paramètres :
Il en résulte que l'hyperfocale est déterminée pour chaque ouverture de diaphragme (pour un objectif de focale donnée).
Remarque : Si vous ne connaissez pas par cœur les valeurs d'hyperfocale de vos objectifs (on vous excusera pour cette fois !), voici un moyen pratique de les retrouver approximativement :
- vous réglez la bague de mise au point sur l'infini (∞)
- vous lisez la distance affichée devant une ouverture donnée : c'est
l'hyperfocale pour cette ouverture (et pour cet objectif).
n |
Focale F |
|||||
20 mm | 35 mm | 50 mm | 80 mm | 135 mm | 180 mm | |
2,8 | 4,8 m (2,4 - ∞) |
14,6 m (7,3 - ∞) |
29,8 m (14,9 - ∞) |
76,2 m (31,1 - ∞) |
217,0 m (108,5 - ∞) |
385,7 m (192,9 - ∞) |
5,6 | 2,4 m (1,2 - ∞) |
7,3 m (3,6 - ∞) |
14,9 m (7,4 - ∞) |
38,1 m (19,0 - ∞) |
108,5 m (54,2 - ∞) |
192,9 m (96,4 - ∞) |
8 | 1,7 m (0,8 - ∞) |
5,1 m (2,6 - ∞) |
10,4 m (5,2 - ∞) |
26,7 m (13,3 - ∞) |
75,9 m (38,0 - ∞) |
135,0 m (67,5 - ∞) |
11 | 1,2 m (0,6 - ∞) |
3,7 m (1,9 - ∞) |
7,6 m (3,8 - ∞) |
19,4 m (9,7 - ∞) |
55,2 m (27,6 - ∞) |
98,2 m (49,1 - ∞) |
16 | 0,8 m (0,4 - ∞) |
2,6 m (1,3 - ∞) |
5,2 m (2,6 - ∞) |
13,3 m (6,7 - ∞) |
38,0 m (19,0 - ∞) |
67,5 m (33,8 - ∞) |
22 | 0,6 m (0,3 - ∞) |
1,9 m (0,9 - ∞) |
3,8 m (1,9 - ∞) |
9,7 m (4,8 - ∞) |
27,6 m (13,8 - ∞) |
49,1 m (24,5 - ∞) |
Une image de 24x30 cm est considérée nette lorsqu'un cercle de 0,3 mm de diamètre est confondu avec un point par un œil humain normal, placé à une quarantaine de centimètres (c'est à dire à une distance égale à la diagonale de l'image environ). Du fait du rapport d'agrandissement (x10 dans un cas général), cela correspond à un cercle de 0,03 mm (30 µm) sur un négatif de 24x36.
C'est le cercle de confusion (e) admis et pris en compte dans les calculs et tableaux présentés ci-après.
Certains constructeurs prennent en compte un cercle de confusion de 50 µm (0,05 mm), ce qui augmente bien sûr la PdC théorique (calculée) mais qui nécessite d'accepter des conditions de netteté moins rigoureuses. Il est vrai qu'il y a une certaine part subjective dans l'appréciation de la valeur du paramètre e, qui joue pourtant un rôle très important dans les calculs ...
En moyen format, on pourrait se contenter d'un cercle de confusion moins contraignant qu'en 24x36 du fait de la taille même du négatif (6x6 cm), mais on prend en compte la même valeur (0,03 mm) considérant que les images finales devraient être de plus haute qualité ...
Exemple : Avec une focale de 80 mm et une mise au point sur 3 m, la PdC est de :
Petite ouverture = Grande PdC
Nota : rappelons qu'une petite ouverture (ou grande fermeture de diaphragme) s'exprime par un nombre de grande valeur (32, 22, 16, ...).
Exemple : avec un diaphragme ouvert à 5,6 et une mise au point sur 10 m, la PdC est de :
Courte focale = Grande PdC
Nota : il résulte de cette règle que la PdC est plus réduite en 6x6 qu'en 24x36, les objectifs 6x6 étant de plus longue focale que les objectifs 24x36 (pour des résultats optiques équivalents).
Exemple : avec un objectif de 80 mm et un diaphragme ouvert à 2,8, la PdC est de :
Grande distance = Grande PdC
Pour une distance p de mise au point, la zone de netteté s'étend pratiquement de (p-1/3 ) à (p+2/3).
Exemple : pour un sujet qui s'étend, en profondeur, de 5 m à 8 m, la distance optimale de mise au point est de 6,15 m (et non pas 6,5 m).
PdC = 1/3 avant + 2/3 arrière
Exemple : avec une focale de 80 mm, un diaphragme ouvert à 2,8 et une distance de mise au point de 3 m, la PdC est de :
Pour ceux qui souhaiteraient refaire les calculs, voici les formules utiles ... sans démonstrations mathématiques toutefois.
f | focale de l'objectif | H | distance hyperfocale |
n | ouverture du diaphragme | PPN | Premier Plan Net |
e | cercle de confusion (e = 0,03 mm) | DPN | Dernier Plan Net |
p | distance de mise au point |
PdC | Profondeur de Champ |
H = (f 2) / (n*e) ( Réglage sur H --> netteté de H/2 à ∞ )
PPN = (H * p) / (H + (p-f))
DPN = (H * p) / (H - (p-f))
PdC = DPN - PPN
Malgré tout ce qui vient d'être dit, le maximum de PdC n'est pas une fin en soi et il n'est surtout pas nécessaire de faire systématiquement appel à tous ces calculs et tableaux pour décider des réglages de mise au point et d'exposition.
Il est toutefois indispensable de savoir comment se comporte la PdC pour pouvoir agir en conséquence sur les paramètres adéquats.
Document rédigé par Jean-Pierre Chantre, et publié dans le bulletin du photo-club d'Issy les Moulineaux ZOOM 92130
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