Le sténopé, à l'origine, c'est un petit trou (le mot vient du grec). C'est sans doute le point de départ de la photographie, puisque c'est la pièce maîtresse de la chambre noire (ou "chambre obscure") qui permet la formation d'une image de la réalité extérieure. On pense que les premières chambres noires étaient déjà connues par Aristote (384-322 av. JC), par le savant arabe Al Hazen (965-1038) et par Léonard de Vinci (1452-1519). Elles furent très employées par les peintres à partir de la Renaissance, pour faciliter la construction des perspectives.
Le principe en est simple : la chambre noire est une enceinte fermée étanche à la lumière. Une de ses parois est percée d'un tout petit trou. Les rayons lumineux provenant des objets extérieurs traversent ce petit trou, s'y croisent et se prolongeant à l'intérieur de la boîte, forment sur la paroi opposée au trou une image inversée des objets environnants.
Evidemment, plus le trou est petit, plus les rayons lumineux le traversant seront étroits et meilleure sera la définition de l'image formée par la juxtaposition de leurs projections.
L'image étant formée sur le fond de la boîte, on peut fixer là une feuille de papier et y tracer les contours de la projection. Et comme depuis Nicéphore Nièpce et Jacques Mandé Daguerre nous savons réaliser des photographies, nous pouvons aussi utiliser une surface sensible : c'est la photographie au sténopé.
Personnellement, bien que connaissant le sténopé depuis longtemps, je ne m'étais livré qu'à quelques essais jusqu'au jour où j'ai acheté un reflex numérique. Est-ce réaction devant ce concentré de technologie, mais dès lors, et sans pour autant négliger la technique moderne, j'ai éprouvé l'envie de revenir à une pratique plus "matérielle" de la production d'images. Pour tout dire, j'ai du mal à faire passer une émotion à travers ces clichés trop techniques. Et peut-être aussi en constatant que la grande majorité de mes photos numériques ne dépassaient guère le stade de l'écran et de la gravure sur CD.
Le sténopé me permet de retrouver le plaisir de mes premières expériences photographiques, des prises de vue avec le folding Kodak de mon père, et des tirages par contact à la lumière du soleil dans de petits chassis-presse.
Enfin, la diversité des satisfactions que l'on en peut tirer est multiple : d'abord le plaisir de fabriquer soi-même son appareil (je me définis souvent plus comme homo faber que comme homo sapiens ! ).
Ensuite, la diversité des objets ou ustensiles que l'on peut employer (ou dévoyer) pour cet usage, diversité qui n'est limitée que par notre imagination, et qui permet aussi de jouer sur le registre du gag, voire du canular : certains ont pris des photos avec des coquillages, des poubelles ou des camionettes. En celà le sténopé est une auberge espagnole où chacun peut apporter sa contribution et qui s'enrichit des apports de tous.
Dans les pages qui suivent, je vous invite à découvrir :